Musiques du paradis
 Nombreux sont les artistes musulmans qui s'inspirèrent de l'oeuvre du grand mystique andalou Ibn Arabi. Cet ensemble tangérois (du même nom), alliant spiritualité et rythmes, s'inscrit dans la lignée directe de son grand esprit. Une coloration purement orientale et originale mêlant les accents plaintifs du Ney aux percussions amples et puissantes du bendir. Pour ces artistes d'une autre dimension, le soufisme est un engagement personnel, profond, dont la musique est la quintessence. Ahmed Khelig, fondateur d'"Ibn Arabi", s'est nourri de diverses influences orientales, au cours d'études musicales approfondies où il s'essaya aux rythmes des plus grands. Celui du neyiste turc Kudsi Erguner et du quanouniste irakien Hussein Al Amir. Une oeuvre artistique digne de l'immense personnalité qui les porte : Muhyidden Ibn Arabi, mystique, philosophe, poète, sage, l'un des penseurs musulmans les plus prolixes de son époque. Né en 1165 à Murcie, et mort en 1240 à Damas, après une existence vouée à ses pérégrinations spirituelles : une transe initiatique qui le ménera aux quatre coins de l'empire musulman de l'époque.
Son oeuvre fut un récital, un voyage de l'âme et de l'esprit assez semblable au répertoire musical de ces quatre jeunes musiciens tangérois, adeptes du Sama, expérience spirituelle de la Confrérie Seddikya. Son imagination créatrice habite le rythme lancinant de leur complainte. Une mélopée qui fait chavirer le corps et l'esprit, transporte vers les cimes les plus élevées : ce lieu secret où tournoient les âmes en quête du Divin.
"Tu es à jamais voyageur, de même que tu ne peux t'établir nulle part..."aimait à répéter Ibn Arabi. Par voyage, il entendait peut-être le parcours des voix angéliques du Munchid : ce long périple qui mène vers cet Autre Chose.
Samia Harici
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